LE SYNDICAT FRANÇAIS DES REALISATEURS
DIT NON
AU DIKTAT DU GOUVERNEMENT AU SERVICE DES PRODUCTEURS
Le mardi 8 octobre à 3h15 du matin le Directeur Général du Travail, accompagné de la présidente du Centre National du Cinéma, a soumis aux « partenaires sociaux » du cinéma le texte d’un « compromis » qu’ils avaient rédigé pour mettre fin au conflit autour de la Convention collective nationale de la production cinématographique.
Les représentants du gouvernement ont sommé les syndicats de salariés de signer ce texte sous la menace de la prise d’un arrêté ministériel annulant l’arrêté d’extension de la Convention pris par le ministère du Travail le 1er juillet 2013 avec application au 1er octobre 2013. Une telle annulation aurait été une grande première. Aucune Convention collective n’a été annulée par un gouvernement pour des raisons extra juridiques depuis le régime de Vichy.
La présidente du Centre National du Cinéma a ajouté qu’à condition que les syndicats de salariés se plient à cet ultimatum, elle demanderait le jour même à Matignon d’arbitrer en faveur d’une augmentation de 50% du crédit d’impôts France pour les films de moins de 4M€. C’est-à-dire : on financera mieux vos employeurs si vous acceptez de diminuer vos salaires !
L’ensemble des organisations de producteurs (APC, UPF, SPI, AFPF, API), comme un seul homme, ont immédiatement donné leur accord sur le texte du « compromis » sans aucune modification.
Côté salariés, le SNTPCT (autonome) après deux, peut-être trois minutes d’hésitation a donné son accord et a signé le texte sur le champ à 3h30.
La CGT a renvoyé, comme il se doit, la décision aux assemblées générales de ses syndicats concernés.
Que dit ce texte de « compromis » intitulé « Avenant de révision de la Convention collective nationale de la production cinématographique » ? :
L’avenant met en place une Convention à trois étages :
-
A l’étage noble les films de fictions de plus de 3,8M€ et les documentaires de plus de 0,75M€ (il n’y en a que trois ou quatre par an). La Convention s’applique pleinement avec garantie de salaires minima de référence, que l’employeur soit adhérent d’une organisation patronale signataire ou non. C’est un progrès certain qui apporte une meilleure sécurité aux mieux nantis.
-
A l’entresol, les films de fiction entre 1,25M€ et 3,8M€ et les documentaire de moins de 0,75€. Ils sont couverts par la Convention (durée de travail, droits sociaux, etc.) mais les salaires subissent une décote de moins 15% à moins 51% selon les postes. C’est mieux que le SMIC, mais très juste pour en vivre pour des salariés intermittents.
-
Dans les chambres de bonnes, les films de fiction de moins de 1,25€ (près de 15% de la production). Ils sont rejetés de la Convention collective. Salaire minimum garanti : le SMIC. Le texte de l’avenant promet l’ouverture d’une négociation pendant six mois pour fixer « le régime qui leur sera appliqué ». sans obligation de résultat.
Le Syndicat français des réalisateurs CGT a réuni son assemblée générale le mercredi 9 octobre pour examiner cet avenant.
-
Considérant que ce texte dénature complètement la Convention collective négociée pendant sept ans et signée le 19 janvier 2012 par l’ensemble des syndicats de salariés à l’exception de la CFDT, et qui s’appliquait à tous,
-
Considérant qu’une Convention qui différencie les salaires en fonction des financements réunis par les producteurs porte atteinte au principe fondamental du droit du travail « à travail égal, salaire égal »,
-
Considérant que le principe de dérogations limitées pour une durée transitoire, que nous avions accepté, est transformé en 2ème palier pérenne de salaires,
-
Considérant que la création d’un troisième niveau de salaires inférieurs et l’exclusion d’une partie de la production de la Convention est une ligne rouge à ne pas franchir,
-
Considérant que la défense des films à petits budgets doit passer par une meilleure distribution et exploitation de ces films et non par la limitation de la rémunération de ceux qui les créent,
-
Considérant que le texte imposé par le gouvernement ne fait que figer l’économie actuelle du cinéma et ne résout en rien les problèmes endémiques du secteur,
L’assemblée générale du SFR-CGT a voté à l’unanimité contre la signature de cet avenant à la Convention collective que nous avions signée.
Par ailleurs, considérant que l’avenant sécurisait la Convention collective, le SPIAC, syndicat des techniciens et ouvriers CGT, a voté à la majorité pour la signature du texte.
La Fédération du spectacle CGT, tenant compte de la position majoritaire du syndicat le plus important dans le champ de la Convention, a signé l’avenant le lundi 14 octobre.
Le SFR-CGT considère que cette signature, décidée en conformité avec la démocratie syndicale et les règles de notre Fédération, est une grave erreur qui cautionne un texte qui enfreint le droit du travail, qui ne défend pas le droit, pour tous ceux qui contribuent à la fabrication des films, de vivre de leur métier et qui n’apporte aucune solution à la défense des films dans leur diversité. Cette signature augure mal de la possibilité de remonter la pente.
Quoi qu’il en soit, le SFR-CGT demeure signataire de la Convention collective du 19 janvier 2012 qui est en vigueur, malgré les entailles qui lui sont faites, depuis le 1er octobre et se battra pour son application la plus stricte et son élargissement à tous.
Aussi le SFR-CGT se félicite que le salaire minimum du réalisateur qu’il a négocié dans le cadre de la Convention, avancée historique sans précédent, ne soit pas remis en cause. Même le groupe de cinéastes pourfendeurs de la Convention – tout à fait égoïstement – ne l’a pas fait. Le SFR-CGT n’aura de cesse que ce salaire minimum, et les droits sociaux qu’il entraîne, soit appliqué à tous les réalisateurs de tous les films dans l’intérêt des cinéastes et du cinéma.
Le bureau du SFR-CGT, le 14.10.13